Traitement sensoriel chez la souris à queue en brosse du Chili (Octodon degus) : un modèle diurne précocial pour l'étude des propriétés des champs récepteurs visuels des neurones du colliculus supérieur

Contexte académique

Le système visuel est un système essentiel pour la perception de l’environnement externe chez les animaux, et son étude concernant le développement et la fonction est cruciale pour comprendre les mécanismes de perception des mammifères. Cependant, les recherches traditionnelles reposent principalement sur des rongeurs de laboratoire nocturnes ou crépusculaires, tels que les souris, les rats et les hamsters. Le système visuel de ces animaux est relativement simple et présente des différences significatives par rapport à celui des humains. Afin d’élargir le champ de recherche et de trouver un modèle animal plus proche du système visuel humain, les chercheurs se sont tournés vers l’Octodon degus, un rongeur diurne, précoce et doté d’une rétine riche en cônes, avec un système visuel bien développé. Ainsi, l’Octodon degus pourrait devenir un modèle idéal pour étudier le développement et la fonction du système visuel.

L’objectif principal de cette étude est d’explorer les propriétés des champs réceptifs (Receptive Field, RF) des neurones visuels du colliculus supérieur (Superior Colliculus, SC) de l’Octodon degus, et de les comparer à ceux des rongeurs nocturnes traditionnels, afin de révéler les particularités de son système visuel. La recherche espère, grâce à cette comparaison, fournir de nouvelles perspectives pour comprendre le système visuel des mammifères diurnes.

Source de l’article

Cet article a été co-écrit par Natalia I. Márquez et ses collaborateurs, dont l’équipe est issue du Département de Biologie de l’Université du Chili et de l’Université du Massachusetts à Amherst, entre autres institutions. L’article a été publié en 2025 dans le Journal of Neurophysiology.

Procédure de la recherche

1. Sujets expérimentaux et préparation

L’étude a utilisé 13 Octodons degus, maintenus dans des conditions spécifiques, incluant un cycle lumineux de 12 heures de lumière et 12 heures d’obscurité, avec de la nourriture et de l’eau disponibles à volonté. Toutes les expériences respectaient les normes éthiques relatives aux animaux et ont été approuvées par les institutions compétentes.

2. Anatomie et traçage neuronal

L’étude a d’abord utilisé la technique de traçage neuronal (Cholera Toxin Subunit B, CTB) pour marquer les projections rétiniennes, afin d’observer les connexions entre la rétine et le colliculus supérieur. Quatre animaux ont reçu des injections intraoculaires de CTB, et après 5 à 7 jours, une perfusion, une fixation et une section du tissu cérébral ont été réalisées pour observer la distribution des projections rétiniennes.

3. Enregistrement électrophysiologique in vivo

L’étude a employé la technique d’enregistrement par électrodes pour surveiller l’activité des neurones du colliculus supérieur. Neuf animaux ont été anesthésiés et fixés à un stéréotaxique, et l’activité électrique des neurones du colliculus supérieur a été enregistrée à l’aide de microélectrodes. Quatre types de stimuli visuels ont été utilisés : un carré blanc en mouvement, des grilles sinusoïdales, un cercle noir en expansion (simulant un objet en approche) et un cercle noir immobile.

4. Analyse des données

L’étude a utilisé un algorithme de clustering pour trier l’activité des neurones, et des méthodes telles que l’ajustement gaussien pour analyser la taille et la forme des champs réceptifs. Les chercheurs ont également utilisé la fonction de Naka-Rushton pour analyser la réponse des neurones au contraste, et la transformée de Fourier pour analyser la modulation de la fréquence spatiale.

Résultats principaux

1. Projections rétiniennes et structure du colliculus supérieur

L’étude a confirmé la structure stratifiée du colliculus supérieur de l’Octodon degus et a découvert que les projections rétiniennes se concentrent principalement dans les couches superficielles (sgs et sz), tandis que les couches profondes (sgi et sgp) reçoivent peu d’entrées rétiniennes. Cela est cohérent avec les découvertes précédentes chez les rongeurs.

2. Taille et forme des champs réceptifs

L’étude a montré que la taille des champs réceptifs des neurones du colliculus supérieur de l’Octodon degus augmente avec la profondeur, et que les neurones des couches profondes présentent une extension plus horizontale. Comparé aux rongeurs nocturnes, les champs réceptifs de l’Octodon degus sont plus petits, ce qui pourrait être lié à leur acuité visuelle plus élevée.

3. Modulation de la fréquence spatiale

L’étude a également révélé que les neurones du colliculus supérieur de l’Octodon degus ont une large gamme de modulation de la fréquence spatiale, certains neurones montrant une préférence marquée pour les stimuli de haute fréquence (0,24 cycles/degré). Cela indique que le système visuel de l’Octodon degus a une résolution spatiale élevée.

4. Réponse au contraste

L’étude a montré qu’environ la moitié des neurones répondent de manière linéaire au contraste, ce qui est relativement rare chez les rongeurs nocturnes, soutenant ainsi l’idée que le système visuel de l’Octodon degus est plus adapté à l’activité diurne.

5. Réponse aux objets en approche

L’étude a également constaté que les réponses des neurones du colliculus supérieur aux objets en approche diffèrent significativement de leurs réponses aux objets immobiles, avec une activité accrue lors de l’approche d’un objet. Cela suggère que le colliculus supérieur de l’Octodon degus pourrait être impliqué dans la détection et la réponse aux objets en approche rapide, comme les prédateurs.

Conclusion

Cette étude est la première à révéler de manière exhaustive les caractéristiques visuelles des neurones du colliculus supérieur de l’Octodon degus, démontrant que son système visuel diffère significativement de celui des rongeurs nocturnes en termes de taille des champs réceptifs, de modulation de la fréquence spatiale et de réponse au contraste. Ces découvertes montrent que l’Octodon degus est un modèle adapté pour étudier le système visuel diurne, en particulier pour explorer les mécanismes de perception visuelle plus proches de ceux des humains.

Points forts de la recherche

  1. Nouveau modèle animal : L’Octodon degus, en tant que rongeur diurne et précoce, offre une nouvelle perspective pour l’étude du système visuel.
  2. Analyse électrophysiologique exhaustive : L’étude a utilisé divers stimuli visuels et des analyses détaillées pour révéler complètement les caractéristiques visuelles des neurones du colliculus supérieur de l’Octodon degus.
  3. Applications potentielles : Le système visuel de l’Octodon degus étant plus proche de celui des humains, il pourrait être utilisé à l’avenir pour explorer les mécanismes de développement et de fonction du système visuel.

Autres informations pertinentes

L’étude propose également des orientations pour des recherches futures, telles que l’exploration du développement du système visuel de l’Octodon degus et le rôle de l’expérience visuelle dans sa maturation. Ces recherches pourraient fournir de nouvelles perspectives sur les processus universels de développement du système visuel.