La signature neurophysiologique corticale de la sclérose latérale amyotrophique

Analyse des caractéristiques neurophysiologiques corticales de la SLA et étude du potentiel des biomarqueurs

Contexte

La Sclérose Latérale Amyotrophique (SLA), également connue sous le nom de maladie de Charcot, est une maladie neurodégénérative survenant chez l’adulte, caractérisée par une perte progressive de l’intégrité des systèmes moteurs du cerveau, de la moelle épinière et du système moteur périphérique. Bien que des recherches cliniques et génétiques aient révélé un chevauchement avec la démence frontotemporale et identifié plusieurs voies biologiques en amont, il n’existe actuellement aucun traitement médicamenteux efficace pour ralentir la progression de la maladie. Les essais actuels reposant sur des résultats comme l’allongement de la durée de survie ne sont pas sensibles. Il est urgent de disposer de biomarqueurs plus sensibles à l’activité individuelle de la maladie afin de tester plus rapidement l’efficacité des médicaments.

Source

Cette étude a été rédigée par Michael Trubshaw, Chetan Gohil, Katie Yoganathan et d’autres, tous affiliés à l’Université d’Oxford au Royaume-Uni. La publication a eu lieu le 13 mai 2024 dans le journal Brain Communications.

Méthodologie et processus de travail

Il s’agit d’une étude observationnelle transversale et cas-témoins utilisant la magnétoencéphalographie sans tâche (MEG) comme outil. L’étude a sélectionné 36 patients atteints de SLA et 51 témoins en bonne santé. Chaque participant a passé une séance de MEG sans tâche (yeux ouverts) de 8 à 10 minutes, suivie d’une IRM structurelle pour l’enregistrement. En utilisant la boîte à outils de traitement des données MEG (OHBA Software Library, OSL), les mesures extraites ont fait l’objet d’analyses de la puissance des bandes de fréquences, de l’indice 1/f (complexité) et de la corrélation de l’enveloppe de l’amplitude (connectivité).

Les étapes spécifiques incluent :

  1. Collecte des données MEG : Scanner MEG et enregistrement de la densité spectrale et de la puissance des oscillations dans des bandes de fréquences spécifiques.
  2. Enregistrement IRM : Enregistrement de données via une IRM structurelle et calibration avec trois points de référence.
  3. Traitement et analyse des données : Utilisation de la boîte à outils OHBA et du logiciel MaxFilter pour nettoyer, débruiter les données, et modélisation et analyse à l’aide de filtres passe-bande et de méthodes de formation de faisceaux.

L’analyse statistique de la conception expérimentale a utilisé un modèle linéaire généralisé basé sur la permutation non paramétrique, corrigeant les comparaisons multiples et les facteurs de confusion. Pour tester si les mesures extraites pouvaient prédire la gravité de la maladie, un modèle de régression par forêts aléatoires a été entraîné et évalué.

Résultats

Dans l’analyse de la puissance, on a observé chez le groupe SLA une diminution de la puissance des ondes bêta et une augmentation de la puissance des ondes gamma dans les zones sensorimotrices. La diminution de la puissance des ondes bêta reflétait une défaillance des neurones inhibiteurs, correspondant à une augmentation de la puissance des ondes gamma. Concernant l’indice 1/f, dans la région fronto-pariétale droite du groupe SLA, l’indice diminuait de manière significative, indiquant une complexité plus élevée de l’activité cérébrale, probablement liée à une excitabilité corticale accrue.

Pour l’analyse de la connectivité, les patients atteints de SLA ont montré une augmentation significative de la connectivité globale dans les bandes de fréquences thêta et gamma, notamment positivement corrélée avec des scores élevés de dysfonctionnement fonctionnel (ALSFRS-R). De plus, l’augmentation de la connectivité dans la bande thêta était principalement observée dans les régions frontales et occipitales, tandis que la connectivité dans la bande gamma apparaissait davantage dans les régions temporales.

Dans le modèle de prédiction, la régression par forêts aléatoires a pu prédire de manière significative les variations des scores fonctionnels de la SLA (R2=0.242, p=0.002), montrant le potentiel des mesures MEG dans la prédiction de la maladie.

Conclusion

Cette étude a utilisé la MEG pour extraire avec succès les caractéristiques neurophysiologiques corticales de la SLA, découvrant que les changements de puissance, de complexité et de connectivité sont liés à la gravité de la maladie, et suggère que les mesures MEG ont le potentiel de devenir des biomarqueurs prédictifs de la SLA. Cela fournirait des indicateurs sensibles pour évaluer l’efficacité des médicaments expérimentaux à l’avenir.

Points forts

  1. Nouvelles découvertes : La découverte d’une diminution de la puissance des ondes bêta et d’une augmentation de la puissance des ondes gamma dans certaines régions corticales chez les patients atteints de SLA pourrait refléter la perte de circuits neuronaux inhibiteurs GABAergiques.
  2. Études de complexité : Les variations de l’indice 1/f reflétant une complexité accrue de l’activité corticale indiquent une excitabilité corticale plus élevée.
  3. Relation entre puissance et connectivité : Clarification de la façon dont les changements de puissance et de connectivité dans différentes bandes de fréquences sont liés au dysfonctionnement moteur et aux mécanismes de compensation du réseau cérébral.
  4. Potentiel prédictif : Les mesures MEG pourraient devenir des biomarqueurs prédictifs de la SLA, augmentant la précision des futures études expérimentales de médicaments.

Cette étude a élargi la compréhension des changements neurophysiologiques corticaux dans la SLA et offre de nouvelles perspectives sur le développement de voies de traitement plus précises. Elle souligne également le potentiel de la MEG comme méthode non invasive de surveillance fonctionnelle du cerveau à haute résolution temporelle, ce qui pourrait offrir de vastes perspectives pour le diagnostic et le traitement futurs de la SLA et d’autres maladies neurodégénératives.