Association spécifique au sexe des facteurs de risque cardiovasculaires avec la migraine : L'étude de Rotterdam basée sur la population
Rapport de recherche sur l’association spécifique au sexe entre les facteurs de risque cardiovasculaire et la migraine
Contexte académique
La migraine est une maladie neurologique courante. Les recherches précédentes ont montré que la migraine, en particulier la migraine avec aura, est associée à des événements cardiovasculaires tels que l’infarctus du myocarde, la coronaropathie et la mortalité cardiovasculaire. Cependant, les études sur la relation entre les facteurs de risque cardiovasculaire (CVRF) et la migraine sont encore insuffisantes. Cette connaissance est cliniquement significative car elle peut fournir des orientations pour réduire le risque cardiovasculaire chez les patients souffrant de migraine.
L’objectif principal de cette étude est d’explorer l’association spécifique au sexe entre les facteurs de risque cardiovasculaire (tels que le tabagisme, l’obésité, l’hypercholestérolémie, l’hypertension et le diabète) et la prévalence à vie de la migraine. L’étude hypothétise que ces facteurs de risque cardiovasculaire sont associés à une prévalence plus élevée de la migraine.
Source de la recherche
Cet article académique a été rédigé par Linda Al-Hassany, MSc, Cevdet Acarsoy, MSc, M. Kamran Ikram, MD, PhD, Daniel Bos, MD, PhD et Antoinette Maassen van den Brink, PhD, des départements de médecine vasculaire et de pharmacologie (Division of Vascular Medicine and Pharmacology), des départements d’épidémiologie (Departments of Epidemiology), du département de neurologie (Department of Neurology) et du département de radiologie et de médecine nucléaire (Department of Radiology and Nuclear Medicine) du centre médical universitaire d’Erasmus. L’article a été publié dans le numéro 4 du volume 103 de la revue Neurology® en 2024.
Conception de l’étude
Sujets et méthodes de l’étude
Cette étude a été menée dans le cadre de l’étude de Rotterdam, une étude de cohorte prospective basée sur la population de la ville de Rotterdam, aux Pays-Bas, ciblant les résidents d’âge moyen et âgés. L’étude a inclus 7266 résidents de la communauté d’âge moyen et âgés, les données sur la prévalence à vie de la migraine et les facteurs de risque cardiovasculaire ayant été obtenues par des entretiens structurés, des examens physiques et des prélèvements sanguins.
Évaluation du diagnostic de la migraine
Le diagnostic de la migraine a été évalué à l’aide d’un questionnaire structuré sur la migraine, basé sur les critères diagnostiques de la deuxième édition de la Classification internationale des céphalées (International Classification of Headache Disorders, ICHD-II). Cette étude n’a inclus que les participants de trois cohortes de l’étude de Rotterdam pour lesquels des données d’évaluation de la migraine étaient disponibles.
Évaluation des facteurs de risque cardiovasculaire
Les facteurs de risque cardiovasculaire incluent le tabagisme actuel, l’obésité, l’hypercholestérolémie, l’hypertension et le diabète. Les données ont été recueillies par entretiens, y compris le statut tabagique, la consommation d’alcool, l’activité physique et l’utilisation de médicaments. Les facteurs de risque cardiovasculaire et métabolique ont été obtenus par des examens physiques et des tests sanguins.
Analyse des données
L’étude a effectué un appariement par âge (1:3) pour ajuster les effets de confusion liés à l’âge. Une analyse de régression logistique conditionnelle a été utilisée pour explorer l’association entre les différents facteurs de risque cardiovasculaire et la migraine, stratifiée par sexe. La méthode d’imputation multiple a été utilisée pour combler les données manquantes, et plusieurs modèles statistiques ont été appliqués pour analyser l’association entre ces facteurs de risque et la prévalence à vie de la migraine.
Résultats de l’étude
Principales découvertes
Parmi les 7266 participants à l’étude, 1085 (14,9 %) remplissaient les critères diagnostiques de la migraine. Les résultats montrent que chez les femmes, le tabagisme actuel (OR 0,72, IC 95 % 0,58–0,90), une augmentation du nombre d’années de tabagisme (OR par augmentation d’un écart type 0,91, IC 95 % 0,84–1,00), le diabète (OR 0,74, IC 95 % 0,56–0,98) et des niveaux plus élevés de glycémie à jeun (OR par augmentation d’un écart type de la glycémie 0,90, IC 95 % 0,82–0,98) étaient associés à une prévalence plus faible de la migraine ; alors que des pressions artérielles diastoliques plus élevées étaient associées à une prévalence plus élevée de la migraine (OR par augmentation d’un écart type 1,16, IC 95 % 1,04–1,29). Chez les hommes, aucune association significative n’a été trouvée entre les facteurs de risque cardiovasculaire et la migraine.
Analyse logique des résultats
Les résultats de l’étude suggèrent que les facteurs de risque cardiovasculaire traditionnels ne sont pas directement associés à la migraine chez les personnes d’âge moyen et âgées. Cette découverte soutient l’hypothèse que la migraine pourrait ne pas être directement influencée par les facteurs de risque cardiovasculaire traditionnels, et que des recherches futures devraient vérifier ces résultats et les étendre à des populations plus jeunes.
Importance de l’étude
Valeur scientifique et applicative de l’étude
Cette étude apporte de nouvelles perspectives sur la relation entre la migraine et les maladies cardiovasculaires, en particulier en tenant compte du rôle potentiel de la modulation par le sexe. Ces découvertes aident à révéler les mécanismes potentiels liant la migraine et le risque cardiovasculaire et pourraient conduire à l’élaboration de stratégies de prévention pour réduire le risque cardiovasculaire global.
Points forts de l’étude
- Découverte importante : Cette étude a trouvé des associations spécifiques au sexe entre certains facteurs de risque cardiovasculaire et la prévalence de la migraine, notamment chez les femmes où certains facteurs de risque cardiovasculaire (tels que le tabagisme, le diabète et des niveaux élevés de glycémie) sont associés à une prévalence plus faible de la migraine, tandis que des pressions diastoliques plus élevées sont associées à une prévalence plus élevée de la migraine.
- Innovation méthodologique : L’étude a utilisé une méthode d’analyse de cohorte exhaustive, combinant l’appariement par âge et des ajustements multi-modèles, assurant l’exactitude et la fiabilité de l’analyse des données.
- Spécificité des sujets de l’étude : Les sujets de l’étude étant des résidents communautaires d’âge moyen et âgés, cela aide à comprendre la relation entre la migraine et les facteurs de risque cardiovasculaire dans cette tranche d’âge.
Conclusion et perspectives
Bien que la relation entre la migraine et les événements cardiovasculaires soit établie, cette étude a trouvé que la plupart des facteurs de risque cardiovasculaire traditionnels ne sont pas associés à une augmentation de la prévalence de la migraine chez les personnes d’âge moyen et âgées. Au contraire, chez les femmes, le diabète, des niveaux élevés de glycémie et le tabagisme sont associés à une prévalence réduite de la migraine, tandis que des pressions artérielles diastoliques plus élevées sont associées à une prévalence accrue de la migraine. Ces résultats suggèrent que l’association entre la migraine et les maladies cardiovasculaires pourrait ne pas être médiée par des facteurs de risque traditionnels, mais pourrait impliquer des dysfonctionnements de la microvascularisation.
Des recherches translationnelles futures sont nécessaires pour vérifier ces hypothèses, explorer les mécanismes spécifiques liant la migraine et les maladies cardiovasculaires, en particulier chez les jeunes et à travers différents groupes d’âge. Par ailleurs, les futures études devraient également envisager d’autres facteurs de risque cardiovasculaire non étudiés, tels que les microemboles, la persistance du foramen ovale, le vasospasme, la dysplasie fibromusculaire, la dissection artérielle et la fibrillation auriculaire.