Diminution de la connectivité thalamocorticale dans l'épilepsie rolandique résolue
Diminution de la connectivité thalamo-corticale dans l’épilepsie rolandique
L’épilepsie rolandique (Rolandic Epilepsy, RE), également connue sous le nom d’épilepsie à syndromes centrotemporal bénignes (self-limited epilepsy with centrotemporal spikes, SELECTS), est l’encéphalopathie épileptique focale développementale la plus courante. Cette forme d’épilepsie s’accompagne généralement de symptômes cognitifs légers à sévères, ainsi que de pointes-ondes et de crises épileptiques induites par le cortex sensorimoteur pendant le sommeil. Bien que la plupart des enfants atteints de RE montrent des déficits cognitifs détectables lors de tests formels pendant la phase active, ces crises et problèmes cognitifs finissent par disparaître d’eux-mêmes. Cependant, de nombreuses questions restent sans réponse, telles que les mécanismes neuronaux spécifiques, les facteurs qui déterminent la disparition des symptômes et les effets à long terme de cette épilepsie. C’est dans ce contexte que cette étude vise à explorer plus en profondeur les changements de connectivité neuronale associés à la résolution des symptômes de l’épilepsie rolandique.
Origine de l’étude
Cette recherche a été réalisée en collaboration entre plusieurs institutions basées à Boston, dont le Département de Neurologie de l’Hôpital Général du Massachusetts, le programme de neurosciences de l’Université de Boston, le Département de Mathématiques et de Statistiques de l’Université de Boston et le Centre de Neurosciences Systémiques, ainsi que la Harvard Medical School. L’article de recherche a été publié dans le journal Clinical Neurophysiology en mai 2023.
Processus de recherche
Conception de l’expérience et processus
L’étude comprenait les principales étapes expérimentales suivantes : 1. Sélection des sujets : 22 enfants répondant aux critères de diagnostic de la International League Against Epilepsy (version 1989) pour la RE, dont 10 en phase active et 12 avec symptômes résolus, ainsi que 13 enfants contrôles en bonne santé sans antécédents d’épilepsie ou de maladies neurologiques connues. Tous les participants avaient entre 4 et 15 ans. 2. Collecte des données : Enregistrements MEG (magnetoencéphalographie), incluant des mesures des champs évoqués par stimulation du nerf médian gauche et droit, ainsi que des enregistrements structuraux et de diffusion par IRM (imagerie par résonance magnétique). Les données MEG ont été enregistrées avec un système à 306 capteurs et un taux d’échantillonnage de 2035 Hz. 3. Traitement et analyse des données : Les données MEG ont été analysées par la méthode d’estimation des moindres carrés (Minimum Norm Estimation, MNE) pour évaluer la distribution des courants corticaux, avec identification et enregistrement du temps de conduction de la réponse évoquée N20 dans le cortex somatosensoriel controlatéral. 4. Analyses ultérieures : Utilisation du logiciel FreeSurfer pour l’estimation volumétrique des données IRM T1-MPRAGE et T2-FLAIR du thalamus, et application de la tractographie probabiliste pour évaluer les connexions structurelles thalamo-corticales.
Détails du processus expérimental
Enregistrements et traitements MEG : Lors des expériences MEG, les données des champs évoqués par la stimulation du nerf médian et visuelle ont été collectées. La position de la tête a été enregistrée environ toutes les quatre minutes pour garantir la qualité de l’acquisition. Les sujets devaient rester éveillés et ont été surveillés par vidéo durant la collecte des données.
Enregistrements IRM : Tous les participants ont subi des enregistrements IRM structuraux et de diffusion, effectués de préférence le jour le plus proche des enregistrements MEG (médiane de 0,0 jour). Les résultats d’imagerie ont été vérifiés visuellement par un neuroradiologue pour confirmer l’absence d’anomalies structurales évidentes.
Analyse des données : Les données MEG et IRM ont été extraites et traitées pour détecter et mesurer les champs évoqués moyens dans l’espace des sources corticales ; ensuite, le volume du thalamus ainsi que la corrélation entre les zones ventrales du thalamus et le temps de conduction ont été évalués ; enfin, les connexions structurelles thalamo-corticales ont été évaluées par tractographie probabiliste.
Principaux résultats de l’étude
Variations des temps de conduction
- Différences dans les temps de conduction des champs évoqués somatosensoriels (SEF) : Comparés au groupe contrôle, les enfants atteints de RE (en particulier ceux dont les symptômes sont résolus) ont montré un temps de conduction N20 des SEF du nerf médian significativement prolongé (P = 0,042, taille d’effet de 0,6 ms).
- Aucune différence dans les champs évoqués visuels (VEF) : Il n’y avait pas de différence significative entre les enfants atteints de RE et le groupe contrôle pour le temps de conduction P100 des VEF (P = 0,83), indiquant que les retards de conduction étaient principalement concentrés dans le cortex sensorimoteur.
Relation entre le volume thalamique et le temps de conduction
- Prédiction du volume thalamique : Le volume général du thalamus n’était pas un prédicteur significatif des temps de conduction des SEF (P = 0,11), mais la région ventrale du thalamus était significativement élargie chez les enfants atteints de RE (P = 0,037) et corrélée positivement avec le temps de conduction (P = 0,023).
- Connexion structurelle de la substance blanche et temps de conduction : Aucune relation significative entre la connexion structurelle de la substance blanche et les temps de conduction des SEF (P > 0,3).
Conclusions et implications de l’étude
Cette étude a démontré que chez les enfants atteints de RE, le temps de conduction prolongé des SEF du nerf médian reflétait une connectivité locale anormale dans les circuits thalamo-corticaux, et ces anomalies persistaient même après la résolution des symptômes. Cette découverte renforce le rôle crucial des circuits thalamo-corticaux dans la manifestation et la résolution des symptômes de RE, révélant que les anomalies structurelles et fonctionnelles durables de ces circuits peuvent fournir un mécanisme compensatoire pour la résolution des symptômes.
Points forts et implications de l’étude
- Nouveau biomarqueur : En mesurant le temps de conduction des SEF du nerf médian, l’équipe de recherche a identifié un nouveau biomarqueur pour la RE, aidant à localiser les points de perturbation anatomiques.
- Compréhension accrue de la physiopathologie : Les résultats de l’étude enrichissent la compréhension des mécanismes physiopathologiques de la résolution des symptômes de cette épilepsie commune chez les enfants. De plus, la relation révélée entre le volume thalamique et le temps de conduction peut refléter des stratégies de traitement inhibiteur accrues au niveau thalamique, fournissant une orientation pour les recherches mécanistiques futures.
Les résultats de cette étude fournissent non seulement de nouveaux outils de diagnostic pour la RE, mais constituent également une référence importante pour le domaine de la neurophysiologie dans l’exploration des mécanismes des maladies et des stratégies de résolution.