Cryonévrolyse du ganglion stellaire gauche guidée par scanner pour les arythmies ventriculaires réfractaires
Cryonévrolyse guidée par CT du ganglion stellaire gauche pour les arythmies ventriculaires réfractaires
Contexte académique
Les arythmies ventriculaires (AV), comprenant la tachycardie ventriculaire et la fibrillation ventriculaire, représentent un défi majeur en médecine cardiovasculaire en raison de leur morbidité élevée, de leur mortalité importante et de leur prévalence croissante. Bien que les médicaments antiarythmiques, les supports de circulation mécanique et les techniques de défibrillation cardiaque puissent atténuer la maladie dans une certaine mesure, ces traitements sont souvent limités pour les patients atteints d’AV réfractaires. L’ablation par cathéter peut être efficace dans certains cas, mais ses effets thérapeutiques sont généralement temporaires, et les patients doivent être suffisamment stables pour tolérer la procédure. En cas de tempête électrique (définie comme trois épisodes ou plus d’AV soutenues ou hémodynamiquement significatives en 24 heures), la mortalité hospitalière reste élevée, allant de 29,2 % à 53,0 %, malgré l’utilisation de médicaments antiarythmiques et de défibrillateurs cardiaques implantables.
Le système nerveux sympathique joue un rôle clé dans l’initiation et le maintien des AV, ce qui en fait une cible thérapeutique importante, en particulier chez les patients en tempête électrique. Les bêta-bloquants ont démontré leur capacité à réduire le fardeau des AV, mais leur utilisation est souvent limitée pour des raisons hémodynamiques. Pour les patients chez qui l’ablation par cathéter n’est pas particulièrement efficace ou réalisable, la dénervation sympathique chirurgicale et le blocage du ganglion stellaire (BGS) peuvent réduire le tonus sympathique et, par conséquent, le fardeau des AV. Cependant, comme pour l’ablation par cathéter électrophysiologique, la sympathectomie chirurgicale peut ne pas être réalisable chez les patients atteints d’AV réfractaires. Le BGS, réalisé sous guidage échographique ou CT, peut apporter un soulagement temporaire des AV et sert souvent de traitement transitoire.
La cryonévrolyse est une technique émergente de modulation nerveuse qui présente des avantages significatifs par rapport aux blocages nerveux traditionnels. La cryonévrolyse induit une lésion axonale de grade II de Sunderland (axonotmèse) et une dégénérescence ultérieure (dégénérescence wallérienne), entraînant une interruption durable de la conduction nerveuse. Il est important de noter que les couches de tissu conjonctif préservées (y compris l’endonèvre, le périnèvre et l’épinèvre) facilitent la régénération nerveuse. Bien qu’un cas clinique ait montré que la cryonévrolyse du ganglion stellaire gauche pouvait fournir une période sans AV allant jusqu’à 5 mois, une cohorte plus large de patients et une analyse complète de la sécurité sont essentielles pour évaluer l’utilité de cette technique.
Ainsi, cette étude vise à évaluer la sécurité et l’efficacité de la cryonévrolyse guidée par CT du ganglion stellaire gauche (CSG) dans le traitement des AV réfractaires.
Source de l’étude
Cette étude a été menée par Ningcheng Li, Junman Kim, Anshul M. Patel, David W. Markham, Christine M. Tompkins, Youssef Rahban, Glenn Stokken, Matthew Gottbrecht, Frank J. Prologo et Neil J. Resnick, issus respectivement du UMass Memorial Medical Center, de l’Emory University School of Medicine, du Piedmont Heart Institute et de l’University of Georgia. L’étude a été publiée en décembre 2024 dans la revue Radiology.
Méthodologie de l’étude
Sujets et critères d’inclusion
Cette étude rétrospective a analysé les patients atteints d’AV réfractaires ayant subi une CSG guidée par CT entre juin 2020 et décembre 2023 dans deux centres de soins tertiaires. Tous les patients répondaient aux critères de diagnostic d’AV réfractaires, et aucun patient n’a été exclu. Les données sur l’état clinique préopératoire, l’approche procédurale, les résultats de la procédure et les événements indésirables ont été collectées. Le nombre de défibrillations avant et après la procédure a été comparé à l’aide du test des rangs signés de Wilcoxon.
Procédure chirurgicale
La CSG a été réalisée en salle de CT, les patients étant généralement sous anesthésie générale. Les patients étaient positionnés en décubitus dorsal, le membre supérieur gauche placé sur le côté et la tête légèrement tournée vers la droite. Une tomodensitométrie hélicoïdale (GE Healthcare) du cou et du thorax supérieur a été réalisée, avec administration de produit de contraste (Omnipaque 350) si nécessaire, pour évaluer le ganglion stellaire gauche près de la jonction costo-vertébrale T1 et les structures anatomiques adjacentes. Les structures clés comprenaient l’artère carotide commune, la veine jugulaire interne, l’artère vertébrale, le tronc thyrocervical, le tronc costocervical, les muscles scalènes antérieur et moyen, le muscle long du cou, l’œsophage, les nerfs spinaux C7, C8 et T1, le plexus brachial, le nerf récurrent laryngé, le nerf vague et le nerf phrénique.
L’approche chirurgicale était supraclaviculaire, de latérale à médiale, avec un trajet latéral à l’artère carotide commune et à la veine jugulaire interne, et médial au muscle scalène antérieur. Après avoir déterminé la trajectoire optimale, les patients ont été préparés et drapés de manière stérile, et une injection de 1 % de lidocaïne a été administrée pour l’anesthésie superficielle et des tissus mous. Sous guidage fluoroscopique par CT, une sonde de cryoablation unique (IceSphere, Boston Scientific) a été soigneusement avancée vers la région du ganglion stellaire. Une nouvelle acquisition d’image hélicoïdale par CT a été réalisée pour confirmer la position de la sonde avant le début de la cryothérapie. Un cycle de congélation de 12 à 15 minutes (température cible de -40 °C) a été exécuté, suivi d’un processus de décongélation passive de 5 à 10 minutes. Un deuxième cycle de congélation de 3 à 8 minutes a été effectué lorsque la pointe de la sonde était proche de l’artère vertébrale pour atténuer l’effet de “cold sink” et assurer une cryonévrolyse suffisante.
Collecte des données cliniques
Les informations cliniques préopératoires et postopératoires, y compris les caractéristiques de base, la gestion préopératoire des AV, l’escalade thérapeutique postopératoire, les interventions supplémentaires et les résultats des patients, ont été recueillies par examen manuel des dossiers cliniques. Le succès clinique a été défini comme l’absence de défibrillation dans les 24 heures suivant la procédure.
Résultats de l’étude
Caractéristiques des patients
L’étude a inclus 17 patients (âge moyen de 60,4 ans, dont 14 hommes). Parmi eux, 7 patients (41 %) recevaient un traitement par bêta-bloquants, et le nombre moyen de médicaments antiarythmiques par patient était de 2,2. La CSG guidée par CT a significativement réduit le nombre de défibrillations, passant d’une médiane de 3 (IQR, 3-15) à 0 (IQR, 0-0) dans les 24 heures précédant et suivant la procédure (p < 0,001). Le succès clinique a été atteint chez 14 patients (82 %) 24 heures après la procédure et chez 15 patients (88 %) 72 heures après la procédure. Après un suivi moyen de 469,2 jours, 14 patients (82 %) étaient en vie, et aucun événement indésirable modéré ou grave n’a été observé. Les événements indésirables légers comprenaient une neuropraxie du membre supérieur gauche (1 cas) et un syndrome de Horner transitoire (3 cas).
Conclusion
La CSG guidée par CT a démontré une efficacité et une sécurité prometteuses dans le traitement des AV réfractaires, et devrait donc être envisagée dans l’algorithme de traitement multidisciplinaire des AV.
Points forts de l’étude
- Découverte importante : La CSG guidée par CT a significativement réduit le nombre de défibrillations chez les patients atteints d’AV réfractaires, avec un taux de succès clinique de 82 % à 24 heures et de 88 % à 72 heures.
- Innovation méthodologique : Cette étude est la première à évaluer à grande échelle l’utilisation de la CSG guidée par CT dans les AV réfractaires, confirmant son potentiel en tant que nouvelle approche mini-invasive.
- Signification clinique : L’étude offre une nouvelle option thérapeutique pour les patients atteints d’AV réfractaires, en particulier dans des situations d’urgence comme la tempête électrique, où la CSG peut servir de traitement transitoire pour gagner du temps en vue d’une gestion plus définitive.
Valeur de l’étude
La valeur scientifique de cette étude réside dans l’évaluation systématique de la sécurité et de l’efficacité de la CSG guidée par CT dans les AV réfractaires, fournissant une référence importante pour la pratique clinique future. Sa valeur appliquée réside dans l’offre d’une nouvelle option thérapeutique pour les patients atteints d’AV, en particulier lorsque les traitements traditionnels sont inefficaces ou non réalisables.
Autres informations utiles
Les limites de cette étude incluent sa conception rétrospective, l’absence de groupe témoin et la petite taille de l’échantillon. Des essais multicentriques randomisés de plus grande envergure sont nécessaires pour valider davantage l’efficacité et la sécurité de cette technique.