Gènes GABAergiques transcriptionnellement régulés à la baisse associés à des dysfonctionnements du réseau de densité synaptique dans l'épilepsie du lobe temporal

Révélation des profils d’expression génétique associés au dysfonctionnement du réseau de densité synaptique dans l’épilepsie du lobe temporal


Contexte

L’épilepsie du lobe temporal (Temporal Lobe Epilepsy, TLE) est le type le plus courant d’épilepsie focale, et ses caractéristiques pathologiques ainsi que ses mécanismes de développement attirent depuis longtemps l’attention dans le domaine des neurosciences. Cette maladie ne se limite pas à une seule région cérébrale (comme le foyer épileptique), mais est considérée comme une pathologie affectant le fonctionnement de réseaux cérébraux plus larges. Les mécanismes fondamentaux de la TLE incluent principalement un déséquilibre entre la transmission synaptique excitatrice et inhibitrice, où la perte synaptique est perçue comme un facteur clé. Ces changements macroscopiques au niveau des réseaux synaptiques pourraient conduire à des dysfonctionnements des réseaux neuronaux globaux, tandis que des déséquilibres au niveau génétique pourraient sous-tendre ces réorganisations synaptiques. Cependant, il manque actuellement des recherches approfondies pour comprendre les changements au niveau du réseau de densité synaptique (Synaptic Density Similarity Network, SDSN) dans le cerveau entier des patients atteints de TLE ainsi que leurs mécanismes d’expression génétique associés.

Face à ces problèmes, les auteurs de cet article ont utilisé une approche combinant imagerie neurofonctionnelle multimodale et transcriptomique pour explorer, pour la première fois, les relations entre les changements macroscopiques du SDSN et les profils d’expression génétique dans la TLE. Cette étude est importante pour éclairer les mécanismes moléculaires et génétiques de la TLE et pour offrir de nouvelles directions dans le développement de traitements basés sur le réseau neuronal.

Article et source de recherche

L’article intitulé « Transcriptionally downregulated GABAergic genes associated with synaptic density network dysfunction in Temporal Lobe Epilepsy » a été rédigé par Rong Li, Ling Xiao et al. L’équipe de recherche provient de plusieurs institutions, notamment l’Hôpital de Xiangya, l’Université Centrale du Sud, ainsi que les institutions académiques d’Axel Rominger et de Kuangyu Shi. L’article a été publié en 2024 dans le European Journal of Nuclear Medicine and Molecular Imaging.


Conception de l’étude et processus expérimental

Cette recherche intègre des données de tomographie par émission de positrons (Positron Emission Tomography, PET) et des données transcriptomiques pour analyser les dysfonctionnements du SDSN chez les patients atteints de TLE et explorer les mécanismes génétiques sous-jacents.

Conception globale de l’expérience

L’étude se divise en deux parties principales : 1) utiliser un nouveau radioligand, [18F]Synvest-1, pour réaliser des scans PET afin d’évaluer les réseaux de densité synaptique globaux des patients atteints de TLE et des témoins sains (Healthy Control, HC) ; 2) combiner deux ensembles indépendants de données transcriptomiques pour étudier les modifications topologiques du SDSN et leurs corrélations avec les gènes de risque liés à la TLE. Voici les étapes expérimentales :

  • Sélection des participants et regroupement :
    Le groupe PET comprend 24 patients atteints de TLE et 17 témoins sains (HC) appariés selon le sexe et l’âge. La localisation et le diagnostic des foyers épileptiques étaient déterminés par deux épileptologues expérimentés à l’aide d’une évaluation multimodale combinant des antécédents neurologiques, des EEG vidéo, des IRM structurelles, etc. L’analyse transcriptomique comprend des échantillons d’hippocampe provenant de 6 patients atteints de TLE et de 6 témoins post-mortem. De plus, pour couvrir l’ensemble des régions cérébrales, l’étude inclut un ensemble de données transcriptomiques de cortex temporal de 161 cas de TLE publiées auparavant par Guelfi et al.

  • Imagerie PET avec [18F]Synvest-1 :
    Après l’injection de [18F]Synvest-1, des images PET statiques ont été acquises pour quantifier la densité synaptique. Ces données d’imagerie ont ensuite été alignées sur les images IRM et normalisées à l’espace MNI standard. À l’aide d’une méthode d’estimation de la densité du noyau (Kernel Density Estimation, KDE), les distributions de probabilité des intensités des voxels dans chaque région cérébrale ont été calculées. Les matrices d’adjacence 246×246 du SDSN global ont ensuite été construites grâce à la divergence de Kullback-Leibler.

  • Séquençage transcriptomique :
    Après l’extraction d’ARN des échantillons hippocampiques, un séquençage a été réalisé sur la plateforme Illumina HiSeq X Ten. Les données ont été alignées avec HISAT2, et une analyse d’expression différentielle (Differential Gene Expression, DGE) a permis d’identifier les gènes significativement régulés. En outre, des données d’expression génétique spatiale cérébrale couvrant 15 633 gènes ont été extraites de la base de données Allen Human Brain Atlas (AHBA) pour l’analyse.

  • Statistiques multivariées et cadre d’analyse en réseau :
    Basé sur les données du SDSN extraites des images PET, des outils d’analyse topologique des réseaux ont calculé des mesures telles que la force pondérée (Weighted Strength), le coefficient de regroupement pondéré (Weighted Clustering Coefficient) et la longueur des chemins pondérés (Weighted Path Length). Les corrélations entre les changements du SDSN et les profils d’expression génétique des gènes de risque TLE ont été modélisées à l’aide d’une régression par moindres carrés partiels (Partial Least Squares, PLS).


Résultats de l’étude

Modifications globales et locales du SDSN

  • À l’échelle globale :
    Les analyses montrent que chez les patients atteints de TLE, la force de connectivité et le coefficient de regroupement du SDSN sont significativement réduits par rapport aux témoins sains, alors que la longueur moyenne des chemins est augmentée. Cela reflète une diminution de l’efficacité de la connectivité globale et de l’intégration locale des informations chez les patients TLE.

  • À l’échelle des nœuds locaux :
    Les perturbations du réseau synaptique localisées concernaient principalement des régions telles que le lobe temporal, le système limbique (par exemple, l’amygdale), les ganglions de la base et le thalamus, ainsi que des régions corticales comme les zones associatives fronto-pariétales. Ces régions sont connues pour leur rôle clé dans la mémoire, la propagation des crises et la régulation de la conscience lors des crises.

Corrélations transcriptomiques avec le SDSN

  • Expression génétique associée à la TLE :
    Un total de 5451 gènes de risque liés à la TLE ont été identifiés, dont 2908 significativement surexprimés et 3250 sous-exprimés. Ces gènes présentaient une corrélation significative avec les variations de poids nodal observées dans les données SDSN dérivées du PET, expliquant environ 13% des modifications du réseau global.

  • Gènes clés :
    L’analyse a révélé que les gènes régulateurs GABAergiques tels que SLITRK3 et RBFOX1 étaient significativement sous-exprimés chez les patients TLE. SLITRK3 joue un rôle important dans la formation des synapses inhibitrices, et son absence peut augmenter la susceptibilité aux crises. De même, la sous-expression de RBFOX1 peut réduire la transmission synaptique inhibitrice et favoriser une hyperexcitabilité neuronale.

Enrichissement fonctionnel et analyse d’interactions génétiques

Les analyses fonctionnelles montrent que les processus impliqués dans le GABA, la potentialisation à long terme (Long-Term Potentiation, LTP) et la signalisation calcique sont perturbés en TLE. Une analyse des interactions démontre que RBFOX1 est un nœud central dans le réseau d’interactions génétiques et possède des connexions significatives avec des gènes comme SLITRK3 et ROCK2, renforçant leur rôle potentiel dans les dysfonctionnements du SDSN.


Importance et implications

Grâce à l’intégration d’imagerie SDSN et de données transcriptomiques, cette étude a permis, pour la première fois, de révéler les fondements moléculaires et génétiques des dysfonctionnements des réseaux synaptiques dans la TLE. Elle met en évidence l’importance des gènes régulateurs GABAergiques tels que SLITRK3 et RBFOX1 dans la perturbation synaptique et justifie leur exploration comme cibles thérapeutiques.

En outre, l’utilisation du radioligand innovant [18F]Synvest-1, combinée à une nouvelle méthode d’analyse SDSN basée sur la divergence de Kullback-Leibler, constitue une avancée méthodologique significative pour l’étude des réseaux cérébraux complexes.

Points remarquables

  • Une première intégration de l’imagerie in vivo et des données transcriptomiques, offrant une vision systématique sur la relation entre le dysfonctionnement du réseau de densité synaptique et les gènes dans la TLE.
  • **Identification du rôle central des gènes SLITRK3 et RBFOX1, soulignant leur potentiel en tant que cibles pour de nouvelles thérapies contre l’épilepsie.**
  • Utilisation innovante du [18F]Synvest-1 et d’un cadre analytique novateur du SDSN pour élargir les possibilités dans la recherche sur l’épilepsie et les réseaux cérébraux.