La taille de la tumeur n'est pas tout : avancer la radiomique comme biomarqueur de la médecine de précision dans le développement des médicaments en oncologie et les soins cliniques
Dans la pratique clinique oncologique et le développement de médicaments d’aujourd’hui, les méthodes d’évaluation de la réponse tumorale sont à la pointe de l’innovation. Depuis que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a proposé en 1981 des critères de classification de la réponse tumorale pour évaluer l’efficacité des médicaments anticancéreux, ce domaine a connu plusieurs améliorations. Le plus connu est le groupe de travail RECIST (Response Evaluation Criteria in Solid Tumors), établi en 1995. Ce groupe, en collaboration avec le National Cancer Institute du Canada, le National Cancer Institute des États-Unis et l’Organisation européenne pour la recherche et le traitement du cancer, a développé des recommandations basées sur des données probantes de nombreux cas, menant à la publication des versions RECIST 1.0 et 1.1, qui ont joué un rôle crucial dans la détermination des taux de réponse objective et autres critères d’imagerie.
Cependant, avec une compréhension plus approfondie de la biologie tumorale et l’évolution continue des stratégies diagnostiques et thérapeutiques, les méthodes d’évaluation traditionnelles basées sur les changements de taille et de quantité montrent leurs limites, nécessitant donc de nouvelles approches pour combler cette lacune. À cet effet, le groupe de travail RECIST a organisé en mai 2022 un atelier multidisciplinaire pour discuter de l’application potentielle de la radiomique dans le développement de médicaments oncologiques et les essais cliniques, notamment en ce qui concerne l’évaluation de la réponse.
La radiomique, en tant que science consistant à extraire des données quantifiables à partir d’images médicales courantes, offre une nouvelle dimension pour évaluer les caractéristiques tumorales et la réponse au traitement. Les évaluations d’imagerie traditionnelles sont principalement basées sur l’interprétation des cliniciens et des mesures bidimensionnelles simples, tandis que la radiomique extrait un grand nombre de caractéristiques à partir des images et utilise des outils bioinformatiques et des technologies d’intelligence artificielle pour analyser ces données, révélant ainsi des aspects moléculaires, génomiques, structurels et microenvironnementaux des tumeurs. Cela offre non seulement de nouvelles perspectives pour comprendre la biologie tumorale, mais aussi un soutien pour les décisions médicales personnalisées.
Cet atelier, présidé par le Dr Erica C. Nakajima et d’autres, publié dans le journal “JCO Precision Oncology”, visait à passer en revue les applications de la radiomique dans la pratique clinique oncologique, en soulignant la nécessité d’intégrer la radiomique dans les essais cliniques. L’article met en avant le potentiel de la radiomique en tant que biomarqueur de précision et les défis à relever ainsi que les étapes futures.
Les applications de la radiomique sont vastes, allant du dépistage précis du cancer à l’évaluation précoce de la réponse tumorale au traitement, en passant par la prédiction des signatures moléculaires des tumeurs. Cependant, malgré son énorme potentiel, l’application de la radiomique en pratique clinique courante reste limitée. Cet article met en évidence une série de résultats de recherche importants démontrant la capacité de la radiomique à prédire la réponse au traitement et à améliorer la conception des essais cliniques.
Pour transformer les avancées en radiomique en résultats tangibles dans le domaine du traitement des tumeurs, une collaboration interdisciplinaire est nécessaire, incluant des radiologues, des oncologues cliniques, des bioinformaticiens et des informaticiens, afin de surmonter les obstacles techniques et méthodologiques. De plus, établir le lien entre les caractéristiques radiomiques et les biomarqueurs tumoraux sera une étape clé pour atteindre des applications cliniques. La conception des essais cliniques futurs devra intégrer et tester la radiomique comme biomarqueur accompagnant.
Cet article non seulement donne un aperçu des applications potentielles et des défis de la radiomique dans le domaine de l’oncologie, mais propose également des directions et des recommandations claires pour son exploration et son application ultérieures, visant à accélérer l’intégration et l’utilisation de la radiomique en tant qu’outil de médecine de précision par le biais de la conception et de l’exécution des essais cliniques.